Ce mardi 28 juin, le Ministère des Familles, de l’enfance et des droits des femmes a restitué les résultats d’une expérimentation menée dans le cadre de l’élaboration d’un réseau d’entraide et de soutien aux familles monoparentales. Un sujet sensible où la démarcation entre réalités et stéréotypes est ténue mais essentielle.
Elle l’a dit à plusieurs reprises : la cause des familles monoparentales lui tient particulièrement à cœur. La Ministre des Familles, de l’Enfance et des droits des femmes a pu réaffirmer son attachement au sujet en ouvrant mardi 28 juin la journée consacrée au lancement officiel du réseau d’entraide et de soutien « Parents solos et compagnie ». Les objectifs : prévenir la solitude parentale et les situations d’épuisement, favoriser l’entraide et la solidarité par l’action collective. La reconnaissance et la valorisation des compétences des mères solos (85% des parents seuls sont des femmes), la mise en exergue de l’empowerment, la lutte contre les stéréotypes et contre la stigmatisation ont fait office de fil conducteur à cette journée.
Une démarche innovante : La recherche action
Pour mener à bien le projet, initié en septembre 2015, Laurence Rossignol a mobilisé des organisations nationales (dont l’AFEV, la CNAF, la MSA, plusieurs associations de parrainage) et sollicité les acteurs de terrain, associations et groupes de parents solos. L’ambition affichée était de partir du terrain et des besoins réels des familles, de les associer dès le départ à la réflexion et de leur donner pleinement la parole. Ne pas agir seulement « pour » mais aussi et surtout « avec ». Le réseau doit se concrétiser par l’élaboration d’un label permettant de valoriser les actions collectives, d’un référencement pour identifier et recenser les ressources locales et d’un site internet pour contribuer à la connaissance sur les parents solos.
Une « recherche action » a été conduite sur cinq territoires, Paris (18ème et 19ème), Pierrefitte-sur-Seine (93) Saint-Herblain (Loire Atlantique), Lille sud (Nord) et Clamecy (Nièvre). Des entretiens individuels ont été menés ainsi que des « focus groupes ». Il est ressorti de cette expérimentation que la stigmatisation ressentie est très forte quel que soit le milieu social car il existerait une « présomption d’incompétence » vis-à-vis des mères seules. Parmi tous les thèmes abordés lors des échanges avec les familles, trois ont semblé particulièrement saillants : la solitude dans l’exercice des responsabilités familiales, le poids des enjeux éducatifs et les conditions financières difficiles.
Ces parents manifestent de fortes inquiétudes : de ne pas être à la hauteur, de voir leur enfant « mal tourner ». Ils se sentent jugés par les institutions, notamment l’école, et soumis à des injonctions paradoxales (nécessité de travailler pour subvenir aux besoins de sa famille et dans le même temps reproche de ne pas être assez présent auprès des enfants).
Face à ces constats et ressentis, les associations préconisent la bienveillance, l’absence de jugement, une posture d’écoute active, le soutien d’organisation collective et la mise en valeur des compétences de ces familles.
Des familles (presque) comme les autres ?
La problématique des familles monoparentales est assez sensible. Laurence Rossignol l’a posé en introduction de son discours, évoquant un « équilibre subtil » à trouver : « il faut sortir ces familles de l’invisibilité sans pour autant les catégoriser ». Et la complexité de ce positionnement est revenu à plusieurs reprises lors de ce 28 juin. La question s’est même posée : finalement, pourquoi un regard spécifique sur ces familles ? Elles-mêmes sont prises entre un désir de normalité, le souhait de se fondre dans la masse, de ne pas être étiquetées, et l’impossibilité de nier des difficultés particulières, notamment économiques. Une représentante de l’AFEV, ayant participé à la réalisation de l’enquête de terrain, explique ainsi que certaines familles ont apprécié d’être sollicitées et qu’on adresse enfin, spécifiquement, ce sujet. D’autres n’ont pas compris qu’on les cible en particulier.
Des mères présentes dans la salle ce 28 juin et ayant participé à la recherche ont bien résumé cette dualité entre d’un côté un statut assumé voire revendiqué et de l’autre une demande de soutien. « J’assume mon rôle, j’en suis fière, dit l’une. Ce n’est pas une maladie. Nos enfants ne sont pas malheureux. » Une autre parle elle de « tabou ». « On est invisibles ». La même dit avoir subi « de plein fouet la stigmatisation ». Elle conclut : « on nous dit qu’on est seuls et pas capables. C’est faux.» Une autre mère prend à son tour la parole. « J’ai rencontré beaucoup de choses difficiles avec ma fille et je ne me suis pas sentie écoutée. On m’a dit que je ne savais pas élever mes enfants. On apprend au jour le jour. Je suis fière d’être maman célibataire. »
Au-delà du regard bienveillant, du positionnement pro actif, de la si nécessaire prise en compte de la parole des premières concernées, il aura peut-être manqué un état des lieux de la recherche sur la monoparentalité et de ses conséquences sur les enfants. On vous propose ici une petite synthèse des résultats les plus récents sur le sujet. Pour combattre les stéréotypes, l’analyse du réel par des observateurs supposés neutres peut aussi se révéler utile.