A l’occasion de la journée internationale des droits de l’enfant qui a lieu le 20 novembre, le Défenseur des Droits et la Défenseure des enfants, Geneviève Avenard, remettent leur rapport consacré à l’école dans lequel ils formulent 30 recommandations.
Enfants migrants, handicapés, décrocheurs scolaires : pour la première fois, le Défenseur des droits, Jacques Toubon et la Défenseure des enfants, Geneviève Avenard, consacrent un rapport à la question de l’école. Pas pour évaluer les programmes ou le système éducatif, là n’est pas leur rôle mais pour analyser al notion d’égalité. Il en ressort trois constatations majeures :
– L’accès à l’école n’est pas un droit effectivement réalisé pour de nombreux enfants
– L’école peine à garantir respect de la singularité et individualité de nombreux enfants
– L’effet des inégalités sociales et des discriminations perdure voire s’accroît
Pas d’égalité des droits devant l’accès à l’école
Le rapport souligne la problématique de l’inscription scolaire pour les enfants qui vivent dans des campements ou des squats. « Tous les jours ce sujet est traité pas nos services » assure Jacques Toubon. Les difficultés proviennent des maires qui imposent pour l’inscription des conditions supplémentaires par rapport aux seules conditions exigeables (document d’identité, preuve de résidence sur la commune apportée par tous moyens, attestation de vaccinations, les parents ayant trois mois pour présenter ce document). Parmi les enfants sans logement âgés de 6 à 12 ans, 10% ne sont pas scolarisés (13% pour les familles en hôtel social). 21% des enfants qui ont déménagé plus d’une fois dans les 12 mois précédant ne sont pas scolarisés. Le rapport évoque aussi la situation des
mineurs non accompagnés. « Ils sont toujours renvoyés dans la pire des situations, assure Jacques Toubon. On conteste leur minorité, ils ne sont pas pris en charge par l’ASE, ou lorsqu’ils le sont ils ne trouvent pas de système d’enseignement, ou quand ils en trouvent un, ils deviennent majeurs dans l’année et leu situation se complique. Plutôt que de tout faire pour qu’ils soient peu à peu intégrés ils sont au contraire laissés au bord du chemin. » Pour les enfants du voyage, il est recommandé d’augmenter la durée maximale de stationnement lorsque les enfants sont scolarisés.
Pas d’égalité des droits dans l’école
Deux catégories de problèmes sont relevées : les inégalités sociales et territoriales et les ruptures de scolarité. Le rapport rappelle une réalité française désormais bien connue : la démocratisation de l’enseignement n’empêche pas des écarts de réussite très importants, écarts qui s’accentuent. « Depuis 2002 le poids de l’origine sociale sur les performances des élèves a augmenté de 33%, pose Jacques Toubon. L’école française est celle où l’origine sociale des enfants influe le plus sur la destinée scolaire. Les enfants issus de famille défavorisées sont trois fois plus susceptibles d’être en échec scolaire. Or la proportion d’enfants pauvres augmente. 1,2 millions d’enfants vivent dans une famille pauvre. »
Donnée qui s’accompagne d’un facteur aggravant : la concentration dans les mêmes écoles des enfants les plus fragiles. Le défenseur des droits estime qu’il faut réduire les inégalités territoriales et pointe l’exemple de la Seine-Saint-Denis qui manque d’enseignants et doit composer avec des enseignants jeunes et peu expérimentés. Mais le sujet est complexe, relève Jacques Toubon en raison de la gestion des carrières des enseignants (qui ne se précipitent en effet pas pour aller enseigner dans ce département, encore moins en fin de carrière). Le rapport pointe encore l’influence des origines sociales sur les orientations, évoquant le poids des préjugés et stéréotypes et déplorant que « les élèves en difficulté soient écartés de seconde générale après la troisième sans qu’on ait cherché à détecter leurs aptitudes, leurs appétences pour réussir dans la voie professionnelle ». Certes. Mais ces enfants ont-ils le niveau pour être orientés en filière générale ? Le rapport laisse entendre que c’est l’école qui discrimine en vertu de stéréotypes et de projections des enseignants. Le problème n’est-il pas plutôt que l’école ne parvient pas, ou plus, à compenser les effets de l’environnement sur le développement cognitif des enfants ? La question est centrale.
Le rapport revient aussi sur le décrochage scolaire (qui a sensiblement diminué d’après le ministère), les enfants porteurs de handicap, les enfants accueillis par l’ASE qui sont nombreux à subir une rupture de leur scolarité.
En conclusion, Jacques Toubon insiste : « il y a un hiatus entre le droit proclamé et l’effectivité du droit. Le droit ne soit plus être une notion étrangère, une culture extérieure. Les principales notions doivent être intégrées par tous. » D’où l’idée de lancer un programme d’éducation au droit.
Geneviève Avenard, elle, voudrait que « chaque enfant compte. »