Voici, pour la période couvrant le mois d’octobre, notre sélection de contenus picorés sur le web concernant le développement de l’enfant et la pédiatrie, le plus souvent en anglais. Vous trouverez, pour chaque focus, un titre de notre composition, le lien vers la ou les source(s) puis un résumé traduit du ou des article(s) mis en ligne sur le sujet.
La réalité virtuelle dans les soins pédiatriques
Advanced Computing Center for the Arts and Design
La réalité virtuelle au secours des petits patients hémophiles. C’est ce qu’est en train de tester une équipe de chercheurs de l’Ohio. Les enfants atteints d’hémophilie sont obligés de suivre un protocole de traitements assez lourd. L’application testée plonge les enfants dans un univers immersif fait de pingouins, de pirates et de bernard-l’hermitte notamment pendant les perfusions, mobilisant ainsi leur attention et transformant un soin a priori désagréable en un moment plus ludique.
Accompagner les enfants placés… avec amour
American Psychological Association
Cette étude menée par une équipe de Pittsburgh dans trois institutions russes accueillant des enfants placés montre l’importance d’une prise en charge emprunte d’une réelle affection, au-delà des soins de base prodigués à ces enfants. Les chercheurs ont comparé trois foyers. Le premier ne devait rien changer à ses protocoles de prise en charge. Dans le second, les éducateurs étaient formés pour interagir avec les enfants sur un mode parent-enfant, de façon chaleureuse, affectueuse, engagée, encourageante. Dans la troisième, l’organisation de la structure était en plus modifiée pour réduire le nombre d’éducateurs référents par enfant et s’assurer qu’une personne allait interagir de façon privilégiée au quotidien avec un seul enfant pour coller le plus possible à un modèle familial. Une fois transférés dans des familles d’accueil, les enfants ayant été d’abord placés dans les foyers 2 et 3 ont manifesté un comportement beaucoup moins agressif.
Le développement cognitif entravé pour 43% des enfants des pays pauvres
The Lancet vient de publier une série d’articles sur la nécessité d’investir urgemment et massivement dans la petite enfance dans les pays en voie de développement. D’après l’UNICEF, 43% des enfants des pays peu ou moyennement développés présentent le risque de ne pas développer leur potentiel cognitif. Un investissement de 50 centimes par enfant et par an pour promouvoir la santé, la nutrition, les soins adaptés, la sécurité et la sûreté, et les apprentissages précoces pourrait changer la donne. Ce dossier rappelle que le cerveau d’un enfant se développe plus vite dans les deux-trois premières années de sa vie qu’à n’importe quel autre moment. A cette période de la vie, le manque de nourriture, de stimulation et de protection produit des effets à très longs termes pour les familles et les communautés. La science et les économistes se rejoignent pour dire qu’il faut massivement investir dans les 1000 premiers jours, incluant la grossesse.
L’impact du plomb sur les compétences en lecture
National Bureau of Economic Research
Des chercheurs américains estiment que l’empoisonnement au plomb est une des causes expliquant le fossé persistant dans les compétences de lecture entre les enfants de milieu défavorisé et les autres. Ils ont analysé les données disponibles dans l’Etat de Rhode Island où une campagne active de mise au normes des appartements a permis de tester de très nombreux enfants au début des années 2000 avant et après la réhabilitation des logements. Les auteurs ont pu constater que les progrès en lecture concernait davantage les enfants concernés par ces programmes de lutte contre les peintures au plomb. Ils estiment même que l’efficacité des politiques de lutte contre les peintures au plomb explique pour un tiers l’amélioration des compétences en lecture des enfants afro-américains et pour un cinquième celle des enfants hispaniques.
Les auteurs reconnaissent néanmoins que les programmes de soutien éducatifs qui visent davantage les populations défavorisées (lesquelles sont aussi les plus touchées par l’empoisonnement au plomb) peuvent aussi expliquer cette amélioration plus marquée dans les performances en lecture. Ils estiment aussi que l’impact du plomb sur le développement cognitif des enfants peut être sur-estimé par rapport à l’explication socio-économique (ces enfants, parmi les plus pauvres, sont souvent élevés par une mère seule peu éduquée).
Les pères pauvres pas forcément démissionnaires
Les politiciens, au premier range desquels Barak Obama, ont tendance ces dernières années à incriminer les pères afro-américains ou de milieux pauvres pour leur manque d’investissement dans l’éducation de leurs enfants. Le Président des Etats-Unis les accusent de déserter la vie de leur progéniture et leur foyer, de se conduire « comme des enfants plutôt que comme des hommes ». Un chercheur prend la défense de ces pères. Auteur d’une étude sur les pères incarcérés, il assure que malgré ce qu’ils affrontent, ces hommes essaient de rester investis auprès de leurs enfants. Robert Keefe estime qu’en ce qui concerne l’investissement paternel, il est essentiellement vu à travers l’aspect économique. Un père investi est un père en mesure de subvenir aux besoins de ses enfants. Or, estime-t-il, les père afro-américains, qui connaissent un taux très élevé d’incarcération et ne peuvent donc pas travailler, tentent malgré tout de rester en contact avec leur enfant, par des appels téléphoniques, la rédaction de lettres, ou à travers les visites au parloir. Il explique que les autres jonglent souvent entre trois ou quatre emplois, ce qui limite le temps qu’ils peuvent passer avec leurs enfants. Sujet là aussi très concernant pour les travailleurs sociaux français. Le taux de monoparentalité est en effet particulièrement élevé dans les quartiers dits sensibles, avec des pères qui ont souvent totalement disparu de la vie de leurs enfants. La raison de cet effacement du père fait l’objet de nombreuses recherches et il est difficile d’avancer une explication unique, entre le père qui se retire de lui-même parce qu’il n’est pas en mesure de payer une pension alimentaire, celui qui fait des allers-retours au pays d’origine, celui qui est incarcéré, celui qui n’a jamais été investi dans l’éducation des enfants.
Détecter précocement les effets sur les enfants des expériences de vie douloureuses
Académie Américaine de Pédiatrie
Lors de la conférence nationale organisée le 24 octobre dernier par l’Académie Américaine de Pédiatrie, des chercheurs ont présenté une revue de littérature afin d’identifier les signes cliniques permettant de repérer les enfants à risque après un événement ou un vécu difficile. Pour les auteurs, de nombreuses études ont montré l’impact sur le long terme des expériences douloureuses vécues dans l’enfance mais il existe encore trop peu de travaux qui mettent en exergue les effets à court terme de ces traumatismes sur le cerveau et le métabolisme des enfants. Les résultats soulignent que les dysfonctionnements au sein du foyer affectent le poids des enfants très tôt dans l’enfance alors que les abus et négligences ont un impact plus tardifs sur le poids. Les enfants exposés à des conditions de vie difficiles ou des événements traumatiques ont également un risque accru de développer de l’asthme, une infection, des plaintes somatiques, des interruptions du sommeil. La maladie mentale maternelle est associée avec un taux élevé de cortisol et la maltraitance est associée avec un faible taux de cortisol.
Pour le Dr Debbie Oh, qui a conduit cette recherche, « avec une intervention appropriée, les enfants sont capables de se remettre de ces effets négatifs sur leur santé, ce qui fait de la détection précoce un outil puissant pour protéger la santé et le bien-être des enfants avant que les mécanismes de l’impact sur leur vie d’adulte ne se mettent en place. »
Les effets de la guerre sur les enfants Syriens en quelques chiffres
Les auteurs de cette étude ont analysé l’impact familial, éducatif et sanitaire de la guerre sur les enfants syriens (1001 enfants, 6 ans en moyenne, 61% de garçons). Près de 20% de ces enfants ont été déplacés au sein de la Syrie, 5% ont un parent décédé ou déclaré disparu. 15% de ces enfants manquent d’accès à l’eau potable, 23% à des sanitaires appropriés, 16% à une nourriture saine, 64% à un professionnel de soins pédiatriques. Le calendrier vaccinal n’est pas à jour pour 72% de ces enfants. Plus de la moitié des enfants en âge d’être scolarisés ne le sont pas.
Interroger l’entourage pour mesurer la persistance des TDAH à l’age adulte
Journal of Child Psychology and Psychiatry
Les auteurs de cet article mettent en garde : pour réussir à établir le degré de persistance des troubles de l’attention avec hyperactivité (TDAH) à l’âge adulte, il faut faire attention à la façon dont sont recueillies les informations. Et peut-être faut-il cesser d’appliquer aux adultes les mêmes critères de diagnostic que pour les enfants. Par exemple, illustre l’auteur principal, si vous questionnez un adulte sur la persistance de ses troubles, il n’en aura souvent pas conscience alors que l’entourage familial, lui, reconnaît toujours percevoir des symptômes. En interrogeant l’entourage on constate ainsi que la moitié des enfants avec des troubles modérés à sévères continuent de manifester certains symptômes à l’âge adulte.
Autisme : les effets de l’acide folique sur certains symptômes…
Les résultats de cette étude considérée comme préliminaire (faible échantillon et expérience sur du court terme) montrent que l’administration d’acide folique (forme synthétisée de la vitamine B) à des enfants atteints d’un trouble du spectre autistique améliore la communication verbale de ces enfants. L’étude montre aussi que la mesure de certains marqueurs sanguins peut contribuer à prédire les chances de réussite d’un tel traitement. Les auteurs conseillent de confirmer ces premiers résultats par des études ultérieures de plus grande ampleur.
…et l’impact positif d’un programme d’intervention précoce auprès des parents
Pour la première fois une étude montre l’impact sur le long terme d’une intervention précoce auprès des parents d’enfants autistes, c’est à dire d’une thérapie médiée par les parents. Les chercheurs ont évalué un programme appelé PACT (Pre-school Autism Communication Trial ). Il s’agit d’un protocole intervenant sur la communication sociale entre les parents et l’enfant qui se décline en 12 sessions de deux heures pendant six mois, au cours desquelles les parents apprennent à mieux interpréter le comportement de leur enfant afin de mieux communiquer avec lui. Pendant les six mois suivants des sessions supplémentaires sont prévues pour soutenir les parents qui doivent également pratiquer 20 à 30 minutes d’exercice chaque jour. Les résultats se révèlent probants : les enfants ayant bénéficié de cette prise en charge avaient des symptômes moins sévères six ans plus tard avec une amélioration de la communication sociale et moins de stéréotypies. En revanche, les compétences langagières n’ont pas été améliorées par ce programme et le niveau d’angoisse des enfants n’a pas diminué.
Inciter l’enfant à s’auto-corriger quand il se parle à lui-même
Early Childhood Research Quarterly
Dans cette étude il apparaît que les enfants ont spontanément tendance à réparer leurs erreurs de langage même lorsqu’ils se parlent à eux-mêmes et pas seulement lorsqu’ils sont en interaction avec des pairs ou un adulte. A partir de ce constat, partant du principe que les enfants commentent naturellement à voix haute ce qu’ils font lorsqu’ils jouent, même seuls, et que la capacité à s’auto-corriger est stimulante pour le cerveau et la construction du langage, que l’auteur principal de l’étude propose aux éducateurs et enseignants de favoriser cette capacité d’auto-correction des enfants lors de leurs monologues. Les adultes peuvent ainsi eux-mêmes commenter à voix haute ce qu’ils font et exprimer les moments de doute quant au choix du vocabulaire ou les corrections apportées à leur propre formulation. Les enfants seront ainsi incités à faire de même et à s’auto-corriger quand ils se parlent.
USA : la si mauvaise santé des enfants placés
Cette étude de grande ampleur analyse l’état de santé mentale et physique des enfants américains pris en charge par les services sociaux. Il apparaît que ces enfants sont particulièrement vulnérables, en mauvaise santé. Ils ont sept fois plus de risque de faire une dépression, six fois plus de risque d’avoir des problèmes de comportement, cinq fois plus de risques d’éprouver de l’anxiété, plus de risques aussi de développer des troubles de l’attention et des apprentissages, des retards mentaux, de l’asthme ou de l’obésité. Une partie de ces difficultés peuvent s’expliquer par les conditions de vie délétères de ces enfants avant le placement. Mais il apparaît que les enfants placés sont en moins bonne santé que les enfants non placés vivant eux mêmes dans des conditions difficiles, ce qui suggère que le placement en lui-même pourrait avoir des effets sur la santé mentale des enfants. Sauf que… les jeunes placés le sont justement parce que leurs conditions de vie sont particulièrement nocives. Il est donc difficile de savoir si c’est le placement en lui-même qui altère leur santé. De la même façon, il peut sembler surprenant que les enfants adoptés après un placement présentent une moins bonne santé psychique que les enfants encore placés et non adoptés. Comme le notent les auteurs, les enfants adoptés sont ceux pour lesquels le lien a été totalement coupé avec la famille biologique. Et il faut que la situation ait été très dégradée pour en arriver là. Ce sont donc des enfants qui, de fait, ont connu les conditions de vie précoces les plus toxiques. Les auteurs ne cherchaient de toute façon pas à savoir quelle était la cause de ce mauvais état de santé mais à en apporter la preuve. C’est chose faite.
En France, il n’existe pas d’étude aussi aboutie avec des résultats aussi nets. Mais à l’initiative du défenseur des Droits, un rapport a été publié au mois de juin dernier sur cette problématique de la santé des enfants faisant l’objet d’une mesure de protection. Ce rapport soulignait notamment :
« certains soignants de ville ne semblent pas assez attentifs aux spécificités du parcours de soin et des affections des enfants placés au titre de la protection de l’enfance. Ces derniers présentent en effet certaines spécificités : un état de santé plus dégradé lié à de moins bonnes conditions de vie et à une distance au soin plus importante, un faible recours aux soins ainsi que des problèmes de santé en lien direct avec les motifs à l’origine de la mesure de placement (notamment en ce qui concerne les maltraitances et les négligences). » Il formulait des préconisations :
« Améliorer la connaissance et le suivi de l’état de santé des enfants protégés grâce à des supports adaptés, dynamiser et formaliser un maillage institutionnel et territorial autour du soin, anticiper et faciliter les changements de statut de l’enfant tels que le retour à domicile et le passage à la majorité, repositionner la dimension santé dans sa globalité comme un élément essentiel de l’accompagnement socio-éducatif de l’enfant protégé, renforcer la place des parents dans l’accompagnement sanitaire de l’enfant accueilli. » Un séminaire co-organisé par le Défenseur des Droits et le Fonds CMU était consacré à cette question ce mercredi 2 novembre.
Les troubles bi-polaires fortement corrélés avec les abus » émotionnels » de l’enfance
Les troubles bipolaires qui se déclarent à l’age adulte seraient fortement corrélés avec des événements négatifs vécus pendant l’enfance. Les chercheurs ont notamment mis en exergue un lien « robuste » avec les « abus émotionnels ».
Fort impact des énergies fossiles sur le taux de pneumonies des enfants
Cette étude met en relation le taux de pneumonies infantiles dans un pays donné et la pollution due à l’utilisation de combustibles solides (charbon, bois) et conclut que la prévalence de la pneumonie, une des premières causes de mortalité chez les jeunes enfants, est bien associée à l’utilisation de ces combustibles. Les auteurs font donc le pari que l’implantation de poêles plus écologiques aurait un impact fort sur la mortalité et morbidité des enfants.
Inquiétudes sur le développement cognitif des enfants en Afrique
Des chercheurs ont souhaité en savoir plus sur le développement cognitif des enfants africains soignés après un « paludisme cérébral », une des très graves complications du paludisme. Ils ont étudié 47 jeunes enfants du Malawi. Leurs conclusions sont inquiétantes. Les chercheurs n’ont en effet pas trouvé de différences flagrantes entre le développement visuo-moteur des enfants guéris et celui des enfants n’ayant pas été malades. Non pas parce que les premiers n’avaient aucune séquelle mais parce que l’ensemble des enfants présentaient de faibles performances par rapport aux données de la littérature. Pour les auteurs, ces résultats interrogent donc l’hypothèse communément admise selon laquelle le paludisme cérébral provoque d’importantes séquelles au niveau cognitif. Surtout ils soulignent qu’au delà de la question du paludisme, l’ensemble des enfants du Malawi présentent un retard cognitif. Et qu’il faut donc analyser les autres facteurs environnementaux susceptibles d’impacter le développement cognitif.
Une détresse psychique grandissante chez les adolescents
Selon la NHS, l’autorité de santé anglaise, le nombre d’enfants et d’adolescents qui s’en prennent à eux mêmes, hospitalisés pour des overdoses médicamenteuses, des scarifications ou des pendaisons, a considérablement augmenté ces dix dernières années, notamment parmi les jeunes filles. Les experts y voient la confirmation de la détresse psychique grandissante des adolescentes soumis à une pression sociale sans précédent. Le nombre de jeunes filles traitées pour des scarifications a quadruplé en dix ans. A noter qu’en France, le très récent rapport de l’Observatoire National de la Protection de l’enfance, qui analyse notamment les appels effectués auprès du SNATED (numéro vert 119) souligne que la part des enfants pour lesquels il est fait état d’auto-mutilations a augmenté de 293% en quatre ans.
Pour les spécialistes britanniques, cet accroissement inquiétant des symptômes de troubles mentaux a des causes multiples : pression scolaire, effets dommageables des réseaux sociaux, séparations familiales, augmentation des inégalités, craintes liées à l’image de soi, abus sexuels, sexualisation accrue.
Le secrétaire d’état britannique à la santé a d’ailleurs plaidé coupable. Il a estimé que la psychiatrie infantile était l’un des grands échecs des politiques publiques de ces dernières années, estimant que trop d’enfants relevant d’un soin en santé mentale n’étaient pas pris en charge de façon suffisamment précoce. Une étude vient en effet d’affirmer que six enfants sur dix adressés à un service de psychiatrie pédiatrique n’étaient en fait pas pris en charge. De nombreux jeunes sont en fait reçus par des associations caritatives qui ne sont pas formées pour traiter des souffrances psychiques graves.
Les écrans et les tout-petits : nouvelles recommandations américaines, contredites par une étude
Académie Américaine de Pédiatrie Frontiers
L’Académie américaine de Pédiatrie propose un outil en ligne, interactif, pour permettre aux familles de mettre au point un « programme familial personnalisé d’utilisation des écrans ». Pour établir ce plan, les parents sont incités à prendre en compte les besoins de santé, d’éducation et de loisirs de chaque enfant comme de l’ensemble de la famille. Les autorités de santé souhaitent que les parents deviennent pro actifs face aux usages que leurs enfants font des supports digitaux. L’AAP a par ailleurs publié de nouvelles recommandations concernant l’utilisation des écrans. Pour les enfants de 2 à 5 ans le recours aux écrans ne devrait pas excéder une heure par jour et devrait ne concerner que des activités engageant l’enfant et le parent. Pour les moins de deux ans, tout support digital devrait être banni, à l’exception des chats par vidéos. L’AAP rassure les parents : ils ne doivent pas se sentir obligés de sensibiliser très tôt leur enfant aux nouvelles technologies car les interfaces sont tellement intuitives qu’un enfant les maîtrise très vite une fois qu’il a commencé. Les nouvelles technologies ne doivent pas être l’unique recours pour calmer un enfant. Des lieux et des temps sans écrans doivent être définis : les chambres, le repas, les temps de jeux parents-enfants. Dans ses recommandations, l’AAP est soucieuse de composer avec l’air du temps. Elle ne veut pas diaboliser les écrans, consciente qu’ils font partie de l’environnement et de la vie des très jeunes enfants, et les règles définies cherchent à concilier les réalités des familles avec les connaissances avérées sur l’impact des écrans. Mais justement, la littérature scientifique semble encore lacunaire sur le sujet, et en tous cas pas consensuelle.
Une étude récente publiée dans Frontiers vient en effet contredire les recommandations de l’AAP. Cette recherche n’a pas pu mettre en évidence un impact négatif de l’usage même précoce (les enfants étudiés avaient entre 6 et 36 mois) des écrans tactiles, sur le développement des enfants. L’étude suggère même un impact positif sur la motricité fine. Les auteurs n’ont pas relevé d’effets de ces usages sur le comportement, les émotions ou le sommeil. Ils considèrent que dans la mesure où ces écrans tactiles sont totalement intuitifs pour des tout-petits, où ils font partie de l’environnement des enfants, où leur usage est déjà devenu une norme, où les parents eux mêmes sont en permanence reliés à leur écran, il est irréaliste de déconseiller l’utilisation de ces outils par des enfants de moins de deux ans.
Les professionnels au contact des enfants sont en revanche nombreux à établir un lien entre l’usage précoce et intensif des écrans avec des problèmes de développement ou de comportement (voir notre interview d’une orthophoniste). C’est l’un des défis des recherches à venir : analyser, notamment, l’effet-dose, la précocité et la nature de l’usage, le lien entre l’environnement familial et le mode d’utilisation. Afin de savoir un jour, et si possible rapidement, si les pessimistes étaient exagérément alarmistes ou les optimistes exagérément rassurants.