Voici notre sélection d’articles parus au premier trimestre 2018 dans de nombreuses revues scientifiques internationales et portant sur le développement de l’enfant. Vous trouverez, pour chaque focus, un titre de notre composition, le lien vers la ou les source(s) puis un résumé traduit. Au menu notamment : les effets du stress parental sur l’enfant, la consommation américaine de Ritaline (pas si démesurée), de nouveaux résultats de Linda Pagani sur l’impact de la télévision.
Les schémas cognitifs inadaptés des parents se transmettent aux enfants
Behavioral and Cognitive Psychotherapy
Cette étude allemande s’intéresse à l’éventuelle transmission des schémas cognitifs inadaptés. Ce modèle des « schémas inadaptés précoces» a été développé par deux chercheurs américains, Beck et Young. Les personnes porteuses d’un trouble de la personnalité mettent en place de stratégies inadaptées face aux situations rencontrées, en raison d’un fonctionnement cognitif lui même mal ajusté. Ces schémas cognitifs (des croyances, une façon de voir le monde et les autres) se mettent en place à partir des expériences vécues, notamment, voire surtout, dans l’enfance. Les auteurs rappellent l’hypothèse selon laquelle les parents ayant eux mêmes connu une mise en place précoce de schémas cognitifs inadaptés ont du mal à répondre aux besoins émotionnels de base de leur enfant qui va à son tour, développer des schémas cognitifs inadaptés. 60 paires parent-enfant (père et mère, enfant adulte) ont été recrutés en population générale. Tous les participants ont répondu au questionnaire de Young pour évaluer les schémas cognitifs puis les parents ont répondu à un questionnaire permettant d’évaluer leurs modes d’adaptation à une situation difficile (classiquement : l’acceptation, l’évitement et la compensation). De leur côté, les enfants ont noté rétrospectivement les pratiques parentales du parent participant. Les chercheurs constatent bien une association significative entre les schémas précoces d’inadaptation des parents et ceux des enfants. Lorsque la stratégie d’adaptation reposant sur l’évitement est présente chez le parent, elle semble peu jouer dans cette association. Alors que la compensation mise en oeuvre par le parent semble bien intervenir dans cette corrélation. Les souvenirs des enfants adultes d’une parentalité difficile pendant leur enfance sont eux aussi liés à des difficultés d’adaptation à l’âge adulte. Pour les auteurs il y aurait donc bien une transmission des schémas précoces d’inadaptation à travers le mode d’adaptation parental (surtout la compensation) et les pratiques parentales. Ce qui a pour les auteurs des implications concernant les interventions basées sur la famille.
La parentalité « hélicoptère » nuit au bon développement de l’enfant
The Journal of Genetic Psychology
L’auteur de cette étude s’est intéressé aux effets de la parentalité « hélicoptère » sur le développement des comportements pro-sociaux et de l’empathie. La parentalité « hélicoptère » désigne les parents sur-protecteurs qui «planent » en permanence autour de leur enfant pour le protéger du moindre danger imminent, lui éviter le moindre désagrément et lui dégager la route vers la réussite. L’auteur part du pré-supposé suivant : cette forme de sur-protection pourrait nuire aux comportements d’auto-régulation de l’enfant et promouvoir des tendances narcissiques, ce qui aurait pour conséquences d’impacter négativement les capacités d’empathie et les compétences pro-sociales de l’enfant. 187 lycéens ont été recrutés pour cette recherche. Les tendances « hélicoptère » des pères comme des mères sont bien prédictives de moins bons résultats des jeunes sur le plan de l’empathie et des habiletés pro-sociales.
Des liens entre la qualité du sommeil des parents et leurs méthodes éducatives
Etudier les liens entre la durée et la qualité du sommeil maternel et une parentalité « permissive » (une discipline inconsistante, c’est à dire l’incapacité à fixer des règles) : voilà l’objet de cette recherche originale. Le fait de dormir suffisamment, sans épisodes de réveils nocturnes est bien corrélé à un moindre risque d’une parentalité permissive. Et cela semble encore plus vrai pour les minorités ethniques (l’étude est américaine) et les mères de faible niveau socio-économique.
Des corrélations entre le stress parental et les compétences sociales des enfants selon le sexe des uns et des autres
Cette étude effectuée par une équipe portugaise montre que le stress parental a un effet sur les compétences sociales de l’enfant. L’éducation « démocratique » (bienveillance et fermeté, écoute et cadre) pratiquée par le père vient moduler cette corrélation, quel que soit le sexe de l’enfant, alors que pour les mères cet effet indirect n’est décelable qu’avec les filles. Les pratiques paternelles autoritaires ont un impact sur les problèmes de comportement externalisés des filles alors que des pratiques paternelles permissives jouent sur les problèmes internalisés des filles. L’étude montre en tous cas l’importance des pratiques éducatives chaque parent pour l’ajustement social des enfants avec des effets très différents selon le parent et selon le sexe de l’enfant. Une étude très similaire à la précédente dans une autre revue (Journal of Child and Family Studies) souligne que les mères présentant le plus de problèmes internalisés (anxiété, dépression…) et externalisés (troubles des conduites, du comportement, agressivité, violence…) ont les enfants qui présentent eux aussi le plus de troubles. Les pères ayant les plus forts troubles externalisés sont associés avec les enfants ayant les plus forts troubles, internalisés comme externalisés. Alors que les pères présentant des troubles internalisés ne sont associés qu’aux enfants présentant les plus faibles troubles externalisés. Le stress maternel apparaît comme un facteur important dans le lien entre les troubles externalisés de la mère et ceux de l’enfant. Le rôle du stress est moins fort dans l’association des troubles internalisés entre la mère et l’enfant. Du côté des pères le stress impacte partiellement l’association entre troubles internalisés du père et troubles externalisés de l’enfant. Les auteurs concluent qu’ il existe une association spécifique entre la psychopathologie des mères et celle de enfants, alors que cette association est moins spécifique pour les pères. Ils estiment également que travailler sur le stress parental peut permettre de réduire les troubles du comportement des enfants.
Comment la relation au sein du couple parental peut influer sur le développement cognitif de l’enfant
Early Childhood research Quaterly
On connaît l’impact de la qualité de la relation conjugale sur le développement socio émotionnel et comportemental des enfants. Il existe moins de données sur les effets de cette relation de couple sur les compétences cognitives des enfants. Cette étude s’intéresse à la façon dont le climat émotionnel au sein de la famille ainsi que l’environnement propice aux apprentissages prodigué par les parents viennent modifier ou pas le lien entre le fonctionnement du couple et les compétences précoces d’alphabétisation des enfants. L’idée est donc d’identifier d’un côté la relation au sein du couple, de l’autre la façon dont cette relation influe sur la capacité des parents à exprimer leurs émotions mais aussi à mettre en place un climat favorable aux apprentissages. Il semblerait que l’expressivité émotionnelle au sein de la famille influe sur l’environnement pédagogique du foyer. Cette chaîne de corrélations est plus importante pour les pères : leur capacité à manifester des émotions positives puis l’impact de ces expressions positives sur leur aptitude stimuler le développement cognitif de l’enfant sont davantage liés pour les pères à la qualité des relations de couple. Les chercheurs estiment que leurs résultats incitent à s’intéresser aux relations de couple et aux interactions familiales lorsqu’on cible les compétences précoces d’alphabétisation des enfants.
La mise à l’écart de l’enfant : la punition la plus utilisée passée au crible par les chercheurs
La « mise à l’écart temporaire » (« time out » en anglais ) constitue l’une des punitions les plus utilisées et préconisées dans les programmes de soutien parental (avec le renforcement des comportements positifs, les félicitations, récompenses, apprentissage de la régulation des émotions etc…). Les auteurs ont ici réalisé une revue de littérature actualisée concernant cet outil pour en évaluer la pertinence mais surtout pour analyser finement sa mise en œuvre, à l’aune des données disponibles, et faire la part des choses entre les préconisations non validées et les conseils nourris par la littérature scientifique. Le time out a régulièrement été contesté (trop humiliant, inefficace, ne permettant pas à l’enfant d’exprimer des sentiments négatifs ou de trouver lui-même des solutions…). Huit paramètres concernant ce seul instrument ont été définis il y a 45 ans : le lieu, le planning, l’avertissement, le signal pour signifier le début et la fin, la façon de l’administrer (instructions verbales ou accompagnement physique), l’explication verbalisée, l’arrêt conditionnel, la durée.
Les chercheurs ont recensé les articles consacrés à chacun des huit paramètres et les ont passés au crible. Ils l’assurent : bien utilisé, le time out est une méthode efficace pour diminuer les comportements considérés comme inadaptés. Les études recensées portent sur des populations très hétérogènes, notamment en terme d’âge puisqu’on retrouve même des adultes porteurs d’une déficience intellectuelle. Il ne s’agit donc pas uniquement de travaux sur les très jeunes enfants.
Concernant la verbalisation de la raison pour laquelle l’enfant est soumis à cette mise à l’écart, il n’existe pas d’étude probante montrant que cette verbalisation est nécessaire ou qu’elle conditionne l’efficacité de la punition. Le recours à l’avertissement (« cesse ce comportement ou tu seras mis à l’écart ») ne semble pas non plus particulièrement efficace. Un trop grand nombre d’avertissements tendrait à impacter négativement l’obéissance de l’enfant. Des avertissements trop répétés perdent de leur efficacité.
Peu d’études existent sur les modalités d’administration. Une étude souligne que conditionner la durée de la mise à l’écart au fait que l’enfant obéit de lui-même à l’instruction verbale (il va de lui-même s’isoler, et qu’il n’est pas nécessaire de l’emmener physiquement) permet en toute logique de réduire le recours à l’administration physique (les enfants acceptent plus facilement de se plier à cette mise à l’écart si on leur promet une réduction de la punition en échange de leur bonne volonté). Certains programmes donnent des instructions précises sur la façon d’administrer verbalement cette punition mais il ne semble pas que ces conseils soient très fondés.
La mise à l’écart doit-elle avoir lieu dans la même pièce ? Les études ne permettent pas de répondre. Finalement, le critère d’efficacité le plus important n’est pas le temps d’isolation lui-même : c’est le fait que l’environnement ordinaire, celui où se trouve l’enfant lorsqu’il n’est pas mis à l’écart, soit plus riche et stimulant que le lieu de l’isolement (l’enfant doit avoir le sentiment d’être privé de quelque chose). Mise à l’écart sous la supervision d’un adulte ou pas ? Cette donnée ne semble pas être déterminante mais évidemment, la présence d’un adulte peut se révéler nécessaire pour s’assurer que l’enfant respecte le temps de la punition.
La majorité des études ne mentionnent pas l’utilisation d’un signal quelconque pour signifier le début et la fin du time out. Concernant la cadence des temps de mise à l’écart la plupart des études penchent pour commencer par un calendrier « continu » c’est à dire que la punition suit chaque comportement inadapté. Lorsque le comportement de l’enfant s’améliore, on peut espacer les mises à l’écart. Néanmoins il semble qu’un calendrier plus « intermittent » avec une punition survenant après un certain quota de mauvais comportement soit plus approprié lorsque l’enfant est d’un tempérament particulièrement agité.
La « libération conditionnelle » de l’enfant (lui dire qu’il pourra revenir dans le groupe s’il est calme pendant un temps donné) n’apparaît pas beaucoup plus efficace que la punition fixe (une mise à l’écart pour un temps donné, quel que soit le comportement de l’enfant) mais elle ne semble pas non plus présenter d’effets négatifs.
Quant à la durée de la mise à l’écart, les données les plus consistantes montrent surtout des effets de séquence : réduire la durée des mises à l’écart au fur et à mesure augmente les comportements négatifs. Un isolement d’une minute est efficace s’il précède des isolements plus longs, pas s’il leur succède. Les durées longues n’apparaissent pas plus efficaces que les durées courtes. La méthode consistant à augmenter le temps d’isolement en fonction de l’âge de l’enfant (une minute par année d’âge), très populaire, n’est supportée par aucune étude probante. Dans les études citées les auteurs recommandent généralement des durées courtes de 2 à 4 minutes parce qu’elles sont plus faciles à gérer (avec des résultats équivalents) et semblent plus éthiques.
Quand la relation à la mère pendant l’enfance résonne dans la vie des femmes adultes
Cette étude réalisée auprès d’étudiants japonais souligne une corrélation, chez les jeunes femmes, entre la perception positive qu’elles peuvent avoir de leur relation à leur mère lorsqu’elles étaient enfant et leurs capacités de résilience à l’âge adulte. Le même phénomène n’est pas constaté chez les garçons.
Mieux dépister les troubles mentaux de l’enfant
Aux Etats-Unis 20% des enfants présentent un problème de santé mentale sur une année donnée. Or, ils sont peu à être diagnostiqués et pris en charge. D’où l’importance du repérage. Une expérience d’amélioration collective des pratiques de dépistage a été mise en place auprès de dix cabinets médicaux en prévention primaire. Ces centres médicaux ont répondu à une étude en trois temps, une supervision mensuelle des dossiers traités a été effectuée pour évaluer le taux d’examens de dépistage, la façon dont les résultats ont été documentés et la codification utilisée. Les cabinets sont passés de 1% d’examens de dépistage effectués à 74% et cette amélioration s’est accompagnée de davantage de renseignements délivrés concernant les résultats obtenus ainsi que d’une amélioration de la facturation et des procédures de remboursements. Pour les responsables de cette expérimentation il reste maintenant à savoir si ce meilleur dépistage aboutit à une facilitation de l’accès à des soins adaptés.
L’autisme au féminin : des spécificités de plus en plus avérées
Journal of autism and developmental disorders
Cette étude souligne que parmi les enfants avec des compétences intellectuelles normales, les filles porteuses d’un trouble du spectre de l’autisme semblent présenter de plus grandes difficultés que les garçons dans les tâches du quotidien. Les auteurs estiment qu’il pourrait exister des biais au moment même du dépistage. Les critères diagnostics pourraient ne pas être adaptés aux filles ou en tous cas sembleraient aboutir à une évaluation moins fine de leur trouble et de leurs difficultés, comme si les filles parvenaient mieux à camoufler ces difficultés au moment des examens diagnostics avec comme conséquence une prise en charge moins efficiente ensuite. Pour les auteurs il est crucial de creuser cette question afin d’éviter que des filles ne passent à travers les mailles du dépistage et afin d’offrir le plus tôt possible à tous les enfants, quelque soient leur sexe, la meilleure prise en charge.
Les enfants en surpoids ne se voient pas gros : déni, protection, résistance au changement
Cette étude norvégienne montre que plus les enfants ont un indice de masse corporelle élevé, plus ils ont tendance à faire une mauvaise analyse de leur image corporelle et à sous-estimer leur surpoids. Cette sous estimation a tendance à s’accentuer avec le temps. Il s’agirait d’un déni en forme de protection. Les auteurs relèvent en effet qu’a contrario les adolescents qui ont tout à fait conscience de leur problème de poids ont plus tendance à être dépressifs. Le problème du déni est qu’il constitue à la fois une protection psychique mai aussi un obstacle au changement. Pour les auteurs, si les enfants peuvent se protéger de cette façon il est en revanche important que les parents, eux, aient bien conscience du problème pour promouvoir des comportements alimentaires et une hygiène de vie adaptés.
Les nouveaux-nés et les ados américains particulièrement vulnérables
Parmi les 19 pays de l’OCDE étudiés, les Etats-Unis présentent les résultats les plus mauvais en matière de santé de l’enfant malgré des dépenses, par enfant, plus importantes. Des chercheurs ont tenté de comprendre ces résultats en analysant les données disponibles sur 50 ans (1961-2010). Ils constatent que les tranches d’âge les plus à risque sont les nouveaux-nés et les adolescents entre 15 et 19 ans. Entre 2001 et 2010 le risque de mortalité était plus élevé de 76% pour les bébés aux Etats-Unis par rapport à la moyenne des pays développés étudiés, et plus élevé de 57% pour les 15-19 ans. Les bébés américains meurent plus qu’ailleurs du fait d’être nés grands prématurés ou de la mort inattendue du nourrisson. Un adolescent américain a 82 fois plus de risque de mourir par arme à feu que les autres adolescents de l’OCDE. Pour les auteurs la périnatalité, la sécurité routière et les armes à feu doivent constituer une priorité des politiques publiques américaines.
D’où l’intérêt de l’expérience présentée dans cet autre article du site news-medical: une université de l’Illinois a signé un partenariat avec le ministère de la santé cubain et trois médecins cubains plus une infirmière ont été dépêchés sur les terres américaines pour apporter leur savoir-faire en matière de prévention périnatale. Malgré la grande pauvreté de l’île son système médical est connu pour être très performant. S’inspirant des services de soins primaires cubains, l’équipe américaine recrute des femmes en âge d’être mère et les soumet à une batterie de questions portant sur leur état de santé, leur bien être psychique mais aussi leur environnement. Ces femmes sont ensuite classées en quatre catégories selon leur niveau de risque. Celles qui présentent le plus de risques se voient proposer des visites à domicile. Il s’agit d’intervenir le plus en amont possible, avant même le projet de conception et d’identifier d’éventuels problèmes de santé qu’un médecin n’aura pas le temps ou ne pensera pas à repérer lors d’une consultation de routine.
Finlande : nette augmentation des troubles psychiques des adolescents sur dix ans
Des chercheurs finlandais ont étudié deux cohortes d’individus, nés à dix ans d’écart, en 1987 et 1997. Ils ont relevé une augmentation du nombre d’adolescents (entre 12 et 18 ans) recevant un diagnostic de dépression ou de trouble neuro-développemental notamment chez les filles. Dans la deuxième cohorte la part des filles concernées par un tel diagnostic s’élevait à 15% contre 10% dans la première cohorte, principalement pour des troubles dépressifs ou de l’anxiété. La part des garçons concernés est passée de 6 à 9%. Il est possible que ces chiffres illustrent davantage un meilleur recours aux services de santé et une baisse du tabou lié à la santé mentale plutôt qu’une réelle dégradation de la santé mentale des adolescents.
Surconsommation de Ritaline aux USA ? Pas si sûr
Journal of child and Adolescent psychopharmacology
A partir d’un registre national de prescription, les chercheurs ont voulu vérifier l’assertion habituelle selon laquelle les jeunes américains se verraient prescrire trop de médicaments pour troubles psychiatriques. Trois catégories de molécules ont été passées en revue : les psychostimulants (comme la ritaline), les antidépresseurs et les neuroleptiques pour des prescriptions concernant les 3-24 ans. Ils ont comparé ces prescriptions avec les prévalences connues des troubles de l’attention, de l’anxiété et de la dépression chez les différentes tranches d’âge, 3-5 ans, 6-12 ans, 13-18 ans, 19-24 ans. Il apparaît que comparés à ces prévalences, les taux actuels de prescription par tranches d’âge n’apparaissent pas disproportionnés. Il n’y aurait pas de prescription exagérée. C’est en tout cas très clair pour les antidépresseurs et les psychostimulants. Le constat est plus flou pour les neuroleptiques dans la mesure où les indications les plus appropriées demeurent incertaines.
L’exposition à une source lumineuse trop intense (comme celle des écrans) avant le coucher entrave le sommeil des enfants
Les enfants qui sont soumis à la lumière brillante d’un écran pendant une heure juste avant le coucher subissent une chute massive de l’hormone favorisant le sommeil, la mélatonine. C’est le résultat de cette expérience menée par des chercheurs de l’université américaine de Boulder. Dix enfants âges de 3 à 5 ans ont été enrolés dans ce protocole de sept jours.
Les cinq premiers jours les enfants ont été soumis à un calendrier de couchage très strict pour normaliser leur horloge biologique et permettre la sécrétion de mélatonine tous les soirs à la même heure. L’équipe a ensuite organisé un environnement tamisé dans la chambre de chaque enfant, couvrant les fenêtres d’un occultant et remplaçant les éclairages par des ampoules de faible intensité, afin de s’assurer que tous les enfants étaient exposés à la même quantité de lumière pendant les deux derniers jours (les enfants ne sont pas sortis). Les taux de mélatonine ont été mesurés à différents moments de la journée. Puis le soir, avant le coucher, les enfants ont été invités à colorier ou jouer avec des magnets sur une table lumineuse (intensité égale à celle d’une chambre illuminée) pendant une heure.
Le taux de mélatonine était de 88% moins important après l’exposition lumineuse et ce taux restait très bas 50 minutes après l’exposition à la lumière. Pour les auteurs ces résultats et pourraient servir de preuve expérimentale pour émettre des recommandations concernant l’exposition lumineuse et les pratiques en matière de sommeil dans la petite enfance.
Télévision à deux ans: le résultat dix ans plus tard sur l’alimentation et les résultats scolaires
Linda Pagani, chercheuse québécoise, est connue pour ses travaux sur les effets de la télévision. Elle vient de publier de nouveaux résultats à partir d’une cohorte de 2000 individus nés en 1997 et 1998. Lorsque ces jeunes ont eu deux ans, leurs parents ont précisé leur consommation quotidienne de télévision. A 13 ans les jeunes ont eux mêmes indiqué quelles étaient leurs habitudes alimentaires et comportement à l’école. Ces enfants sont nés avant les smartphone, précise Pagani, et avant que des recommandations officielles ne soient édictées concernant les usages des écrans avec les tout petits. Ils ont été élevés avec la télévision et sans considérer que cela pouvait être potentiellement nocif. Il s’agit donc d’une étude « naturaliste », sans interférences extérieures.
Chaque heure supplémentaire de consommation télévisuelle à deux ans augmente de 8% le risque de mauvaises habitudes alimentaires. Les adolescents ayant beaucoup regardé la télévision enfant avaient un IMC plus élevé que les autres, une moindre appétence pour l’effort, et de moins bonnes performances scolaires et une moindre ambition.
Pour les auteurs, cette consommation télévisuelle précoce installe très tôt les enfants dans des comportements passifs qui n’incitent pas à l’effort. Les conséquences se manifestent sur le long terme, en dehors de tout facteur psychologique ou socio-économique. Ces effets sont maintenus même lorsque les facteurs socio-économques sont pris en compte. A noter néanmoins que d’après cette recherche, plusieurs éléments sont associés à l’exposition à la télévision à 29 mois : l’agressivité physique de l’enfant; les symptômes de dépression de la mère, la configuration familiale, l’éducation de la mère, l’index de masse corporel chez la mère. Pour Linda Pagani, les parents utilisent les écrans comme une récompense et une distraction. Ils établissent une « douce incitation à la paresse » à un moment à haute teneur éducative, quand l’enfant pourrait au contraire apprendre le self contrôle. Pour elle cela revient à conditionner les enfants à rechercher plus tard cette même distraction dans des moments qui nécessiteront au contraire un un effort cognitif. Ce qui se traduira notamment par un moindre sens de l’effort en classe. Ces chercheurs estiment que les recommandations américaines d’une heure de télévision maximum par jour pour les enfants de deux à cinq ans est donc justifiée.
La double peine des enfants africains porteurs d’un handicap
Une recherche d’ampleur menée par la Guinée, le Niger, la Sierra Leone et le Togo, montre que les enfants porteurs d’un handicap sont victimes de violences quasi systématiques depuis leur naissance. Perçus comme une malédiction de dieu, ces enfants ne mériteraient pas de vivre pour les adultes et qui les entourent et les autres enfants. Tous ces jeunes subissent des violences de la part de leurs parents, des enseignants, de leurs pairs. La violence endurée dépende du handicap. Les enfants avec un deficit visuel, un trouble de la communication ou de la cognition sont les plus maltraités.