Voici, pour les mois de juin, juillet et août 2016, notre sélection de contenus picorés sur le web et concernant le développement de l’enfant, la famille et la parentalité, le plus souvent en anglais. Vous trouverez, pour chaque focus, un titre de notre composition, le lien vers la ou les source(s) puis un résumé traduit du ou des article(s) mis en ligne sur le sujet.
Allaitement et guidance parentale intensive pour un meilleur développement cognitif
Deux études canadiennes financées par Grand Challenges Canada (agence nationale qui promeut l’innovation en matière de santé globale), réalisées en Afrique du Sud et au Pakistan mettent en exergue les facteurs permettant d’optimiser le bon développement d’un enfant. La première étude établit un lien très clair entre la durée de l’allaitement maternel exclusif avec la prévalence du trouble des conduites entre 7 et 11 ans (terminologie très contestée en France). Plus cet allaitement exclusif est long, moins les enfants présentent plus tard des troubles du comportement. Elle évoque également d’autres éléments de prévention précoce : l’accueil en crèche et la stimulation de l’enfant par le jeu à la maison.
La deuxième étude livre les résultats d’une expérience menée auprès de familles très pauvres du Pakistan. Adaptée d’un programme de l’UNICEF, elle a consisté à conseiller les parents d’enfants de moins de deux ans en matière de nutrition et d’interactions avec l’enfant (pendant les moments de jeu et de communication). A l’âge de quatre ans, les enfants dont les parents avaient bénéficié de cette guidance présentaient un QI plus élevé, de meilleures compétences pré scolaires et un comportement social plus adapté. Une réelle victoire pour les promoteurs de cette étude qui rappellent que les compétences stimulées au cours de ce programme sont très prédictives de la réussite scolaire sur le long terme.
Plus les troubles des conduites surviennent tôt, plus ils impactent le cerveau
Santelog (texte en français)
Selon une étude internationale, les adolescents et jeunes adultes présentant des troubles du comportement présentent une épaisseur corticale différente dans certaines zones du cerveau par rapport à des adolescents au comportement ordinaire. Surtout, l’âge auquel ces troubles sont apparus se révèle décisif: seuls les jeunes ayant développé de tels troubles dès l’enfance présentent ces modification corticales. Les chercheurs ne peuvent pas expliquer ces différences biologiques. L’étude semble néanmoins plaider pour une prévention précoce de ces troubles des conduites. Sujet hautement polémique en France où le rapport de l’INSERM de 2005 proposant un dépistage et une prise en charge précoces avait suscité une levée de boucliers de la plupart des spécialistes du champ médico-social.
Le stress des pères en situation très précaire
Journal of Family issues
Les pères occupant des emplois précaires développent un stress particulier dû à l’instabilité de leur situation professionnelle. Il semblerait que le fait de cumuler deux emplois ou d’avoir des horaires très flexibles ait une incidence plus forte sur le stress des pères que sur celui des mères.
Plaidoyer d’un pédiatre pour un soutien précoce aux parents “pas suffisamment bons”
Dans cet article du JAMA Pediatrics, Dimitri A.Christakis, demande qu’on s’intéresse davantage aux plus petites « expériences défavorables de l’enfance ». La littérature scientifique se penche depuis longtemps sur les effets des traumatismes subis pendant l’enfance, maltraitances psychiques, physiques ou sexuelles, négligences, grande pauvreté, violence conjugale etc… L’auteur souhaite qu’on étudie davantage les effets d’une parentalité « mal avisée » ou pas assez adaptée aux besoins de l’enfant, le plus souvent par manque d’informations. Lire une histoire le soir, ne pas exposer un très jeune enfant aux écrans, veiller à des horaires de repas et de sommeil réguliers…autant de règles éducatives qui contribuent au bon développement d’un enfant. De façon moins aisément quantifiable, la façon dont les parents interagissent avec leur enfant, dont ils accompagnent ou pas ses émotions, va avoir un impact considérable sur son développement. Les enfants qui ne bénéficient pas de réponses parentales adaptées, rappelle Dimitri A.Christakis, sont moins aptes aux apprentissages scolaires lorsqu’ils entrent à l’école primaire. Ils subissent, en quelque sorte, la perte d’une chance. Le médecin estime qu’il est capital de transmettre aux parents des conseils basés sur des preuves scientifiques pour leur permettre d’accompagner de façon optimale le développement de leur enfant. Nous avons développé cette information dans un article complet
Royaume-Uni: La situation alarmante de la protection de l’enfance
Guardian
L’organisme anglais chargé d’évaluer les services locaux de protection de l’enfance, l’Ofsted, a rendu un rapport très sévère, estimant qu’un quart des conseils chargés de cette mission n’étaient pas à la hauteur, incapables d’assurer la protection d’enfants vivant des « circonstances familiales chaotiques » et que moins d’un quart étaient considérés comme vraiment efficaces. En 2015 certains conseils avaient déjà perdu leur agrément et étaient retombés sous la tutelle gouvernementale en raison de prestations jugées trop médiocres. Plusieurs facteurs semblent expliquer ce constat alarmant : les coupes budgétaires, notamment en prévention précoce, le turn over des professionnels, des pratiques inadéquates, l’absence d’implication des instances politiques locales, l’augmentation des besoins (certains travailleurs doivent suivre jusqu’à 35 enfants). Résultat : les évaluations de situations préoccupantes sont trop tardives ou n’ont pas lieu, certains enfants ne sont jamais vus seuls.
Les enfants très impulsifs plus à risque face aux addictions, sauf si leurs parents sont sécurisants
Science Directe
Cette étude québécoise souligne encore une fois l’influence de l’environnement dans le développement d’un enfant. Elle rappelle d’abord que les enfants affichant précocement certains traits de caractère (forte impulsivité, réticence à l’effort, affects négatifs, anxiété, timidité) ont statistiquement plus de risque de sombrer dans une addiction à l’âge adulte. Mais le risque disparaît lorsque ces enfants moins « canalisables » grandissent dans un environnement paisible avec des adultes bienveillants et sécurisants. Ces enfants à fleur de peau peuvent alors devenir des adolescents très créatifs tout en étant capables de gérer leurs émotions.
Pour une prévention primaire des troubles du comportement
JAMA pédiatrics
Les trois pédiatres américains auteurs de cet article plaident pour que la petite enfance et le suivi pédiatrique constituent des moments privilégiés de prévention de la santé mentale. Les troubles du comportement constituent en effet un important facteur de risque pour la santé et apparaissent souvent dans l’enfance. « Tout comme l’immunisation est prodiguée en soins primaires à travers un calendrier vaccinal pour prévenir les maladies infectieuses, nous pensons que les rendez-vous médicaux de routine présentent une remarquable opportunité pour la prévention primaire de nombreux troubles physiques et mentaux de l’enfant et de l’adulte. » Les auteurs rappellent d’ailleurs qu’un texte a récemment placé au cœur des missions des maisons de santé américaines la surveillance de routine et le dépistage des troubles du développement et du comportement, afin que ces troubles soient repérés avant qu’ils ne deviennent sévères. Ils vont plus loin. Constatant l’efficacité des programmes de soutien à la parentalité (tels que Triple P ou Incredible years), ils estiment qu’il faut proposer ces programmes en routine, en prévention primaire, de façon universelle et plus seulement ciblée (uniquement pour des parents déjà identifiés comme plus vulnérables). Cette information a été reprise dans notre article sur les pédiatres américains face à l’échec scolaire
En Australie aussi, les mamans solos soumises à de fortes pressions
Child Poverty Action Group
La responsable australienne d’un centre de soutien aux mères seules, Leonie Morris, livre un témoignage très concret des difficultés auxquelles sont confrontées les femmes qu’elle accompagne :
La plupart de ces femmes ont eu à subir de la violence conjugale et certaines sont encore sous la coupe du conjoint violent par l’entremise des enfants et de leur garde. Elles sont très angoissées par la question du travail. Lorsque leur enfant a moins de trois ans, reprendre une activité professionnelle leur semble irréaliste. Parce qu’elles savent qu’elles auront à s’absenter en cas de maladie de l’enfant, parce qu’elles font vite le calcul et constatent qu’elles dépenseront leur salaire en frais de garde et en frais de transports, parce qu’elles se sentent plus utiles auprès de leur enfant et parfois auprès de leurs parents diminués. Elles disent sentir la pression des services sociaux qui les incitent à trouver un travail à temps plein alors qu’elles ont la possibilité de bénéficier encore plusieurs mois d’une aide financière suffisante. Leonie Morris prend la défense de ces mamans solos selon elle pas assez soutenues.
Trop d’enfants laissés seuls chez eux en journée
Une association de protection de l’enfance anglaise s’est alarmée d’avoir reçu au cours de l’été 453 appels et mails signalant de jeunes enfants laissés seuls chez eux. Les trois quarts de ces appels ont donné lieu à des signalements à la police et aux services sociaux. L’article précise qu’il n’existe pas d’âge précis à partir duquel on peut laisser un enfant seul et que la maturité de cet enfant, l’environnement, le moment de la journée entrent en ligne de compte. Et qu’évidemment tout enfant laissé seul doit être informé de ce qu’il doit faire en cas d’urgence.
Les familles précaires américaines ont conscience des bienfaits des repas pris en famille…mais sont rattrapées par le réel
Journal of Family Issue
De nombreuses études ont souligné l’impact des repas pris en famille sur la cohésion familiale et le bon développement des enfants, notamment dans les classes moyennes et/ou les familles blanches américaines. Cette étude a approfondi la question auprès de familles afro américaines à faibles revenus. Ces parents valorisent les repas en famille et ont conscience de leur impact positif. Mais les contraintes horaires, la configuration du foyer, les corvées ménagères, l’attrait du fast-food et l’emploi peu rémunéré entravent l’organisation de ces repas.
Déficit de diagnostic des TDAH chez les enfants afro-américains
Des chercheurs se sont penchés sur le net différentiel de diagnostic et de prise en charge des troubles de l’attention et de l’hyperactivité entre les enfants afro américains et les enfants blancs. Ils concluent à un sous-diagnostic et donc un déficit de prise en charge de ces troubles chez les premiers plutôt qu’à des sur-diagnostics et des médications abusives chez les enfants blancs.
Les écrans, une drogue digitale pour les enfants
Le DR Nicholas Kardaras, auteur du livre « Glow kids » (glow signifie « lueur », « éclat ») compare les écrans à de l’héroïne digitale, estimant que les enfants succombent à une forme d’addiction et se comportent comme des junkies. La première partie de son texte relate l’histoire de Susan et de son petit garçon John. Lorsque John a découvert Minecraft, Susan l’a laissé jouer, estimant que ce n’était jamais que des Légo électroniques et que l’appli était donc « éducative ». Au début, elle trouvait son fils très engagé dans le jeu, réactif et cela lui semblait positif. Mais peu à peu elle voit John changer, de plus en plus obnubilé par son jeu, rêvant de cubes et blocs la nuit, jusqu’à le trouver un soir dans un état quasi catatonique. Nicholas Kardaras évoque des adolescents tour à tour apathiques ou très agressifs, incapables de s’investir lorsqu’ils ne sont pas connectés. Il rappelle que de récentes recherches à base d’IRM ont montré que l’usage prolongé des jeux digitaux modifie le cortex frontal de la même façon que le fait la cocaïne. Le médecin explique qu'”un centime de préventif est bien plus efficace qu’un euro de curatif”. Une fois qu’un enfant a passé la ligne rouge, il est très difficile de le faire revenir en arrière. « En fait, j’ai trouvé plus simple de traiter des patients accros à l’héroïne et aux amphétamines que des joueurs accros aux jeux vidéos ou des dépendants à Facebook.” Comment empêcher les enfants d’en arriver là ? « Empêcher des enfants de 4, 5 ou 8 ans d’être happés par les écrans, ça veut dire les légos plutôt que minecraft, les livres plutôt que l’ipad, la nature et le sport plutôt que la télé. Et si vous le devez, demandez à l’école qu’elle ne mette pas de tablette écran entre les mains de votre enfant avant l’âge de dix ans ». Il incite à avoir des conversations franches avec l’enfant pour expliquer les raisons de ces contraintes. Et à bannir tout écran sur la table au moment du repas (en famille, bien sûr).
L’Illinois incite les couples homosexuels à adopter
Dans l’Etat de l’Illinois où le mariage homosexuel a été légalisé récemment, les agences en charge de l’adoption et le service de protection de l’enfance comptent sur les couples gays et lesbiens pour devenir famille d’accueil ou parents adoptifs. Trop d’enfants restent en effet sans foyer et les couples homosexuels constituent un nouveau vivier de familles potentielles pour ces enfants qui en sont privés.