Elisabeth Laithier, adjointe au maire de Nancy, co-présidente du groupe de travail petite enfance de l’AMF, vient de remettre au gouvernement un Vade-mecum sur l’attribution des places en crèche.
Plutôt qu’un rapport ou un référentiel Elisabeth Laithier a opté, en accord avec Agnès Buzyn, Marlène Schiappa et François Baroin, Président de l’Association des Maires de France, pour un “Vade-mecum”. Pourquoi ce document lui-a-t-il été demandé ?
1) Parce que la demande de place est en France bien supérieure à l’offre, ce qui crée des tensions (une collectivité sur deux est confrontée à un problème de gestion de flux et reconnaît avoir des difficultés à gérer pression des familles). Marlène Schiappa le souligne : il existe un décalage entre la perception des familles et les procédures des collectivités. « Les parents font état d’un sentiment que le process d’attribution est obscur et mystérieux. En tant qu’élue locale j’avais l’impression que ce processus était au contraire très rigoureux. » C’est donc un réel enjeu démocratique qui doit permettre aux élus locaux de retrouver la confiance des citoyens et de « balayer tout soupçon de clientélisme ». Pour autant, chacun le rappelle à l’occasion de cette remise officielle : la petite enfance n’est pas un service public obligatoire
2) Parce que la Stratégie Pauvreté a mis la petite enfance au cœur de la lutte contre les inégalités et que les EAJE sont censés se trouver en première ligne. Agnès Buzyn le rappelle : « il ne s’agit pas d’un gadget dans la réduction des inégalités liées à l’origine sociale. Mais d’un rouage essentiel, central, décisif. La crèche est le lieu de la socialisation, qui va être synonyme d’accès au langage, aux compétences cognitives, au savoir être. C’est une première arme dans lutte contre l’assignation sociale et donc un enjeu majeur ».
3) Parce que les modes d’accueil, outils de conciliation entre la vie privée et la vie professionnelle constituent un levier d’égalité femmes-hommes. « Quand il n’y a pas de modes de garde c’est la femme qui s’arrête de travailler », rappelle Marlène Schiappa.
De la pré-inscription à la réorientation en cas de réponse négative
Ce Vade-mecum est présenté comme un « guide de bonnes pratiques », « une boussole », avec des « jalons qui viendront borner les procédures d’attribution ». Il n’est en rien contraignant. Le document encourage dans un premier temps les collectivités à « faciliter les démarches d’inscription pour l’ensemble des familles désirant une place en crèche, afin de diminuer les différentes formes de non-recours ». La phase de la pré-inscription doit permettre de cerner au mieux les besoins des familles. Sa dématérialisation et son informatisation peuvent faciliter la tâche pour les parents actifs mais ne doit pas décourager les publics moins à l’aise avec l’informatique. Elisabeth Laithier insiste beaucoup sur la problématique du non recours. Autres recommandations : réunir des commissions collégiales pour l’attribution, faciliter la réorientation vers les différents modes d’accueil en cas de réponse négative, accompagner plus étroitement les familles avec des besoins spécifiques, choisir des critères d’attribution pertinents à l’aune d’un diagnostic partagé, panacher les critères d’attribution retenus afin de répondre à la fois aux familles désirant concilier vie familiale et vie professionnelle et à celles en situation de précarité.
Pas d’obligation de transparence
Le groupe de travail dédié à la petite enfance dans le cadre de la Stratégie pauvreté avait préconisé, d’ « élaborer avec les élus concernés un socle de critères communs d’attribution des places en accueil collectif et de renforcer la transparence sur la publication des critères d’attribution ».
Concernant les critères d’attribution, il n’est pas question dans le Vade-mecum d’un référentiel national (pour mieux coller à la réalité et aux spécificités du terrain local) mais pas non plus d’une obligation de transparence. D’un côté Agnès Buzyn assure lors de la remise du document : « Nous rendrons les attribution plus équitables, objectives, transparentes ». De l’autre côté, Elisabeth Laithier concède qu’« il n’est pas écrit noir sur blanc que les communes doivent publier sur leur site les critères retenus ». L’adjointe au maire de Nancy souhaite élargir le débat. « Nous pourrions, devrions réfléchir plus globalement à la politique d’accueil du jeune enfant. Comment fait-on pour lever les différentes formes de non recours ? Nous n’avons pas de réponse à cette heure. Des parents ne font même pas la demande car ils sont persuadés qu’ils n’auront pas le droit d’avoir une place. Quelle passerelle imaginer pour réorienter les parents qui n’ont pas obtenu de place ? Comment harmoniser les pratiques entre gestionnaires privés et publics ? » Beaucoup de questions et pour l’heure peu de réponses.