La cohorte longitudinale Elfe initiée en 2011 et pilotée par l’INED et l’INSERM présente un volet santé conséquent. Elle a notamment pour objectif d’étudier l’effet des contaminants de l’environnement. Quelques premiers résultats concernant l’imprégnation par des femmes enceintes ont été présentés.
Lors de la deuxième matinée de la journée du 13 mars, Clémentine Dereumeaux, de Santé Publique France, a proposé un focus sur l’imprégnation des femmes enceintes par les polluants de l’environnement en France en 2011. Six familles de polluants organiques ont été étudiées : bisphénol, phtalates, pesticides, dioxines, duranes, retardateurs de flammes, composés performés. Ils sont tous classés comme perturbateurs endocriniens, et substances cancérogènes.
Pour le bisphénol, les niveaux d’imprégnation étaient légèrement inférieurs à ceux observés précédemment dans les cohortes Eden et Pélagie. Cette diminution légère de l’exposition s’expliquerait par la substitution d’autres composants. L’alimentation apparaît comme la principale source d’exposition avec les aliments pré emballés dans du plastique et boîtes de conserve. L’inhalation des toxiques avec l’air intérieur est une autre source de contamination. Il peut aussi y avoir une exposition récente et ponctuelle liée au matériel médical utilisé pour la césarienne. 99% des femmes présentaient au moins un phtalate. Les niveaux d’imprégnation étaient néanmoins inférieurs aux niveaux précédents, en raison de la modification des procès industriels. L’imprégnation augmente avec la consommation d’aliments riches en matières grasses, l’utilisation de produits d’entretien, de produits cosmétiques et de peinture pendant la grossesse.
Côté pesticides, la France est le premier pays utilisateur en Europe et les pesticides sont largement utilisés à des fins domestiques (notamment le désherbant). 100% des femmes présentent par exemple un niveau de concentration quantifiable de pyréthrinoïdes . Il s’agit de niveaux supérieurs aux études américaines. Cette sur-imprégnation de la population française a déjà été observée auparavant. Les explications avancées: l’utilisation de produits anti poux et anti puces, la consommation de tabac et d’alcool, les cultures agricoles à proximité du domicile. Les pesticides organochlorés et organophosphorés se retrouvent an quantité plus faible qu’auparavant (en raison de changements d’usage). Quant aux polluants organiques persistants (dioxines, furanes, retardateurs de flamme, composés perfluorés), toutes les femmes testées présentaient au moins une de ces substances.
Les niveaux d’imprégnation de retardateurs de flammes sont en revanche plus faibles qu’aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne ou au Canada en raison de stratégies différentes pour lutter contre les incendies. Précisons que d’autres équipes de recherche travaillent, à partir d’autres cohortes, sur les effets de cette exposition in utero aux polluants chimiques sur le développement de l’enfant (voir notre article): Claire Philippat, de l’Inserm investigue le lien entre exposition in utero aux retardateurs de flamme et survenue de l’autisme et Rémi Beranger, sage-femme épidémiologiste, étudie l’impacte des ethers de glycol sur le développement cognitif des enfants.