Voici, pour la période couvrant le mois d’octobre, notre sélection de contenus picorés sur le web sur le thème de l’école, le plus souvent en anglais. Vous trouverez, pour chaque focus, un titre de notre composition, le lien vers la ou les source(s) puis un résumé traduit du ou des article(s) mis en ligne sur le sujet.
Nouvelles technologies à l’école primaire : oui, sous conditions
Le département d’Education américain vient de publier de nouvelles recommandations pour l’usage des technologies dans les apprentissages des enfants de moins de huit ans. D’après ce texte, les nouvelles technologies peuvent offrir aux jeunes enfants un environnement stimulant pour la création et le développement de l’intelligence. A la condition que ces outils soient utilisés de façon active et engagée de la part de l’enfant (en opposition au visionnage passif d’une vidéo), en interaction avec un adulte. Car c’est bien cette interaction qui permet les apprentissages.
Les enfants d’origine asiatique aux USA : une très riche étude qui peut faire écho à la situation française
Child Development Article 1
Child Development article 2
Le journal Child Development consacre une large section à la problématique des enfants issus de l’immigration asiatique aux Etats-Unis. Depuis 2009, l’immigration asiatique dépasse en nombre chaque année celle d’origine africaine ou latine. Les auteurs sollicités rappellent notamment que la communauté asiatique est vue comme un tout alors qu’elle est évidemment très diverse et que cette diversité se reflète notamment dans les résultats scolaires des enfants. Les jeunes d’origine cambodgienne, laotienne, de la communauté hmong ou issus de vagues d’immigration plus récentes comme le Népal ou le Bengal, sont nombreux parmi les décrocheurs scolaires alors que les élèves d’origine indienne ou taïwanaise ont de bons résultats. Dans 10 des 19 groupes ethniques venus d’Asie, la grande majorité des enfants ne fréquentent aucune structure petite enfance avant l’entrée à l’école à six ans. Les très bons résultats scolaires d’une partie de ces enfants empêchent souvent de voir que le tableau est en fait très contrasté et que les difficultés psychologiques sont élevées parmi cette minorité. Les enfants de la deuxième et troisième génération réussissent globalement moins que ceux de la première génération. Cette baisse est notamment forte dans la communauté hmong. Or ces élèves passent souvent à travers les mailles du filet et ne bénéficient pas de soutien spécifique parce qu’ils ne manifestent pas de problèmes de comportement. Les auteurs expliquent également que même parmi les enfants qui ont de très bons résultats, on observe d’une génération à l’autre une baisse du niveau de l’expression orale, ce qui a un effet sur le développement global du langage (et sur la réussite scolaire en général).
Les auteurs posent qu’au cœur des stéréotypes concernant la communauté asiatique figure l’idée que cette population, à laquelle sont attachées les valeurs de travail et d’effort, ne serait pas confrontée au racisme. Et que ces valeurs ainsi doublées d’une absence de discrimination, assurent leur succès. Les auteurs soulignent au contraire que la très forte exigence scolaire de ces familles est une réponse aux discriminations subies et aux barrières à l’entrée dans les domaines non scolaires (loisirs, sports, politiques). C’est parce qu’elles perçoivent ces obstacles que ces familles sur-investissent l’école.
L’étude souligne encore que les relations entre pairs sont affectées par cette image de l’étudiant asiatique meilleur élève que les Noirs et les Latinos. Selon les auteurs, les enseignants manifestent une nette préférence pour les élèves asiatiques, qui sont plus scolaires en général et qui ne sont pas insolents ou violents. Même lorsqu’ils ont de piètres résultats, ils n’apparaissent pas comme des éléments perturbateurs. Les auteurs laissent entendre que ce sont les projections, même inconscientes, des enseignants, qui enferment les élèves dans des typologies bien précises selon leur ethnie, que ce contraste entre les élèves afro ou latino-américains et les élèves asiatiques serait une construction des professeurs. La question se pose aux Etats-Unis comme chez nous où de récentes enquêtes ont montré que les enfants d’origine asiatique sur-performent à l’école quand les élèves issus d’Afrique sub-saharienne ou de Turquie, par exemple, ont beaucoup plus de difficultés que la moyenne.
Deux options sont possibles : ou les enseignants français et américains ont tous tendance à enfermer leurs élèves dans des stéréotypes ethniques ou il existe bien, pour des raisons notamment culturelles, des différences d’ajustement scolaire entre les enfants issus de familles africaines (ou sud américaines, ou maghrébines) et les enfants asiatiques. Ou la discrimination scolaire est systémique, ou les difficultés scolaires des élèves sont bien réelles et sont aussi à chercher dans leur environnement familial et culturel, dans les conditions socio-économiques. Le débat est chez nous extrêmement vif, avec de plus en plus de voix appelant à ne pas enfermer les jeunes issus de l’immigration dans des postures victimaires, et qui considèrent que parler d’idées reçues revient à nier le réel. D’autres assurent que c’est l’école qui discrimine, de façon systémique, que ces jeunes n’ont pas au départ de difficultés particulières et qu’ils sont orientés au faciès ou encore que les programmes, méthodes pédagogiques et modes d’évaluation leur sont défavorables.
En tous cas, et en conséquence, les élèves asiatiques, plus appréciés de leurs professeurs, suscitent chez leurs pairs une forte dose de ressentiment. Les auteurs de l’étude rappellent que le taux de harcèlement est très élevé chez ces enfants, plus élevé que chez les jeunes Afro ou latino américains. En France c’est à l’occasion du décès d’un commerçant chinois après une violente agression à Aubervilliers (93) cette année, que la communauté asiatique a pris la parole pour exprimer ses peurs et son ras-le-bol. Ce sont notamment les jeunes, décidant de sortir de la réserve jusqu’alors manifestée par leurs aînés, qui se sont massivement exprimés pour dénoncer le racisme dont ils feraient l’objet, notamment de la part d’autres minorités.
Le Canada confronté à un afflux massif de familles syriennes : comment accompagner les parents à l’école ?
CBC News
Dans cette tribune, Jerome Cranston et Shauna Labman, deux enseignants-chercheurs de l’Université canadienne de Manitoba, s’interrogent sur la meilleure façon de garantir l’intégration et la réussite scolaire des enfants réfugiés syriens. La semaine précédant cette publication, le Ministre canadien en charge de l’immigration et des réfugiés a confié sa surprise devant la taille des familles syriennes venues demander l’asile au Canada et estimé que le nombre d’enfants était plus important que prévu. Le débat a donc très vite porté sur la capacité des écoles à prendre en charge ces enfants et à bien les accompagner. Les auteurs de la tribune remarquent qu’il n’a pas été question des parents. Or, arguent les deux universitaires, l’implication des parents dans l’éducation et la scolarité de leurs enfants est un des premiers leviers favorisant la réussite. Ils demandent qu’un travail soit mené pour comprendre les différences culturelles, pour comprendre notamment ce qu’implique la participation parentale pour des familles syriennes. Ils plaident pour que les parents syriens soient accompagnés et formés au fonctionnement des écoles canadiennes. Ils insistent sur la nécessité de favoriser des relations positives avec l’école et une réelle coopération. Sur ce sujet, voir notre reportage mis en ligne il y a quelques mois sur l’accueil des enfants migrants en Allemagne.
Les écoles texanes accusées de faire des économies sur le dos des enfants en difficulté
NPR education
Au Texas, 8,5% des élèves bénéficient d’une éducation spécialisée pour des troubles des apprentissages ou du comportement (autisme, TDAH entre autres). Il y a quelques années ce taux était plus proche des 11%. La moyenne nationale aux USA est de 13%. Il semblerait, selon cet article, que le Texas ait décidé de réaliser de substantielles économies sur le dos des enfants « à besoins particuliers » et que les écoles soient soumises à de fortes pressions pour ne pas dépister les enfants. Un ancien responsable de l’agence texane d’éducation estime qu’il n’y a aucune raison pour que le nombre d’enfants pris en charge pour ces troubles ait diminué, dans la mesure où « le nombre de bébés de petits poids, les grossesses adolescentes, le nombre d’enfants pauvres n’ont pas eux même diminué ». L’article illustre la problématique avec l’exemple d’une petite fille de huit ans, Citlali, en grave échec scolaire et perturbatrice de sa classe. La maman a réclamé pendant des années que sa fille soit examinée et reconnue comme porteuse de troubles. Une fois le diagnostic de troubles sévères posé, en dehors de l’école, il faudra une lettre d’avocat pour que la petite fille finisse enfin par bénéficier d’un enseignement spécifique.
L’école maternelle de plus en plus envisagée en Inde, toujours très débattue aux USA
Le comité indien qui porte le projet de scolarisation universelle des enfants dès trois ans est en train de finaliser son rapport. Le gouvernement serait favorable à cette mesure. Il est donc possible que l’Inde scolarise bientôt, comme la France, les enfants de moins de 5 ans. Aux Etats-Unis le sujet suscite toujours de nombreux articles, en raison notamment de la campagne présidentielle. De plus en plus de spécialistes plaident en effet pour un accueil des enfants de 4 ans dans des classes pré-élémentaires (ce qui n’est absolument pas la règle aujourd’hui, quelques rares Etats ont des écoles maternelles, la plupart proposent un accueil en jardin d’enfant à partir de 5 ans).
Dans cet article de The Atlantic, Hayley Glatter explique que certains experts craignent néanmoins que la charrue ne soit mise avant les bœufs : avant de généraliser des programmes, expliquent-ils, il faudrait se mettre d’accord au niveau national sur ce qui fonctionne vraiment en matière de pré-scolarisation. L’objectif étant, en grande partie, de réduire les inégalités scolaires. Deux chercheurs viennent ainsi de publier une étude réalisée dans Le Tennesse qui souligne que la scolarisation des enfants de 4 ans a un impact positif à court terme mais qu’ensuite, les enfants ayant été scolarisés plus précocement ont de moins bons résultats que les autres. Ils sont donc inquiets que des fonds publics soient d’ores et déjà, et massivement, consacrés à l’ouverture de classes de maternelle sans que soit davantage posée la question de ce qui va être proposé au sein de ces classes. Ils déplorent également que n’ait pas été défini le socle minimum de compétences que les enfants scolarisés en maternelle sont censés acquérir avant l’entrée au CP pour réussir leur scolarité en élémentaire. Mais cette étude effectuée dans le Tennessee a elle-même été très contestée, rappelle Hayley Glatter. D’autres chercheurs assurent qu’il existe sur la question un très fort consensus dans la communauté scientifique : oui, la scolarisation précoce facilite les apprentissages académiques ultérieurs. William Gormley, un autre chercheur dans le domaine, explique qu’il peut y avoir un biais dans l’étude du Tennessee : étant donné que la scolarisation précoce n’y est pas universelle, les enseignants d’élémentaire n’ont pas forcément revu leur pratique, pas adapté leur pédagogie à des élèves qui avaient déjà derrière eux deux ou trois années d’école. Les enfants ont pu alors recevoir des enseignements redondants et perdre le gain des années antérieures.
Et là dessus, l’ensemble des experts semblent d’accord : il ne sert à rien de mettre le paquet sur l’école maternelle si le reste de la chaîne n’est pas modifié. Il faut voir le système scolaire dans son ensemble sinon cet accès de tous les enfants à la maternelle relèvera de la pensée magique.
Un apprentissage efficace des fractions, compétence essentielle
Plos One
Cette recherche avait pour but de tester l’apprentissage des fractions tel qu’il est proposé par les « Common Core standards » aux Etats-Unis. Les Common Core Standards définissent précisément les compétences que les élèves doivent maîtriser niveau après niveau en langue et en mathématiques.
Les auteurs de l’étude rappellent en introduction que de nombreux enfants et adultes éprouvent des difficultés à manier les fractions. Or, la compréhension de cette représentation mathématique des nombres est une compétence capitale. La connaissance précoce des fractions est un fort prédicteur de la réussite ultérieure en mathématiques. Les professeurs de mathématiques estiment que le manque de connaissances concernant les fractions est l’une des principales explications aux difficultés rencontrées par les étudiants en algèbre.
Les Common Core Standards posent que cet apprentissage des fractions doit permettre aux enfants de concevoir les fractions comme des nombres avec des valeurs qui peuvent être comparées et ordonnées (s’ils sont capables de poser que 1/2>1/4>1/6, ils ont compris le mécanisme). Ce postulat a été posé par les enseignants mais sans preuves empiriques. Cette étude a donc testé ce postulat. Résultat : oui, cette façon d’ordonner les fractions sur une ligne permet aux enfants de mieux comprendre le concept de magnitude des fractions (et le principe des fractions en lui-même). Les auteurs encouragent d’autres chercheurs à tester d’autres recommandations des standards, « afin que la communauté scientifique puisse produire les preuves scientifiques nécessaires pour un débat informé et les améliorations dans cette initiative éducative majeure ». Rappelons que les « common core standards » font l’objet depuis plusieurs années d’une vive remise en cause parce qu’ils donnent lieu à des évaluations très fréquentes des élèves. Ces évaluations pousseraient les enseignants à mettre trop de pression sur les élèves, dès le jardin d’enfant. D’autres commentateurs déplorent régulièrement que ces standards amènent à négliger les matières artistiques ou le développement des compétences socio-émotionnelles pour à se focaliser uniquement sur les compétences académiques.
Sensibiliser les très jeunes enfants au langage mathématique améliore leurs compétences ultérieures
Journal of Research on Educational Effectiveness
Les compétences en mathématiques des enfants sont très fortement corrélées à leur maîtrise précoce du langage mathématique. C’est ce que cette étude a voulu mettre en évidence. Des histoires mettant en scène des notions mathématiques (la quantité par exemple) ont été lues à des enfants de maternelle et ces lectures ont ensuite été suivies d’échanges portant spécifiquement sur ces concepts. Ces enfants ont ensuite présenté des compétences mathématiques bien plus élevées que le groupe témoin. Les chercheurs en concluent donc que l’exposition des jeunes enfants au langage mathématique a un effet bénéfique sur les compétences mathématiques qu’ils développeront ensuite.
L’éducation des enfants, activité plus stressante pour les mères que pour les pères
Le temps passé avec les enfants est davantage synonyme de stress pour les mères que pour les pères (même si, notent les chercheurs de l’étude, l’écart de résultat n’est pas très important). Cette différence est due à la nature des activités menées. Les mères sont encore cantonnées aux soins primaires, à la cuisine et au ménage alors que les pères peuvent se livrer à des activités plus gratifiantes comme jouer avec l’enfant. Les mères sont aussi plus souvent seules avec l’enfant et plus soumises aux interruptions de sommeil.