Un Diplôme Universitaire dédié à l’accompagnement à la parentalité et destiné dans un premier temps aux pédiatres, accueillera sa première promotion en octobre 2019. Il a été initié par Catherine Gueguen, connue des professionnels de l’enfance pour son travail de vulgarisation autour des neurosciences affectives et sociales.
Lors d’une récente journée dédiée à la santé mentale périnatale que nous venons de chroniquer, Catherine Salinier, pédiatre à Bordeaux, affirmait, pour souligner l’importance de la prévention primaire, que le pédiatre est « le médecin de l’adulte que l’enfant sera demain ». Une autre pédiatre, une autre Catherine, voit dans ses confrères les premiers soutiens des parents de cet adulte en devenir, à condition qu’ils soient formés pour remplir cette mission. Catherine Gueguen a ainsi initié un tout nouveau diplôme universitaire qui démarrera en octobre prochain à la Faculté de médecin de la Pitié Salpêtrière, dont elle est co-responsable, avec le docteur Juliette Andreu Gallien, sous la direction du Professeur Alexandre Duguet. L’objectif, tel qu’il est rappelé sur le site de la Sorbonne est de « former les pédiatres, interlocuteurs privilégiés des familles dès le séjour en maternité et durant toute l’enfance et l’adolescence pour qu’ils puissent accompagner les parents dans l’éducation de leurs enfants ». « Ce DU souhaite transmettre aux pédiatres les connaissances les plus récentes sur les besoins relationnels des enfants, sur les conséquences des violences éducatives, sur les approches visant à renforcer leurs compétences socio-émotionnelles (CNV-Communication non violente- méditation), sur les programmes de soutien à la parentalité et sur leurs pratiques. La formation sera assurée par des nombreux apports théoriques mais également par une approche pratique et expérientielle permettant aux participants de mettre rapidement en action les connaissances acquises, de réfléchir à leur pratique.»
Au programme CNV, attachement, méditation
Pour Catherine Gueguen il est urgent que les pédiatres prennent connaissances des données de la recherche en matière de neuro-sciences affectives et sociales et qu’ils comprennent « que ce ne sont pas des discours de bisounours ». Ce D.U sera basé sur le développement des compétences sociales et émotionnelles, sur la communication non violente et sur la méditation. Pour la pédiatre il s’agit de faire passer un message essentiel : la posture empathique, chaleureuse et soutenante de l’adulte est le meilleur garant d’un bon développement de l’enfant. En modifiant en profondeur le comportement de l’adulte, donc du parent, on peut impacter considérablement le bien-être présent et à venir de l’enfant. Ce D.U, qui se déclinera en six modules de deux jours et sera validé par la soutenance d’un mémoire, formera notamment les pédiatres à la notion d’empathie, à la compréhension des émotions et à la méditation. Il laissera la part belle aux débats et à la réflexion et sera scandé par de nombreux exercices pratiques. Il fera intervenir des spécialistes de la CNV et des violences éducatives ordinaires, des connaisseurs des programme de guidance parentale comme Corinne Roehrig ou Béatrice Lambloy, des spécialistes de l’attachement, Nicole Guedeney évidemment mais aussi Anne Raynaud Postel, et même un philosophe, Abdennour Bidar.
Catherine Gueguen souhaite commencer avec les pédiatres parce qu’ils voient tous les parents, dès la maternité mais elle envisage d’ouvrir ensuite ce D.U aux professionnels de l’enfance.
Les pédiatres en première ligne pour la prévention primaire
Avec cette initiative, Catherine Gueguen suit finalement les préconisations formulées il y a un peu plus de deux ans par l’Académie Américaine de Pédiatrie, qui avait appelé les pédiatres à se positionner comme des accompagnants à la parentalité de première ligne (voir notre article). La société savante avait ainsi posé que les pédiatres sont les garants de la santé, du bon développement physique et psycho-moteur des enfants mais qu’ « ils sont aussi bien positionnés pour se faire les avocats d’une prime éducation de très haute qualité, sur la base d’outils scientifiquement validés, offrant les fondations pour des capacités d’apprentissage optimum ». L’AAP précisait :« les pédiatres peuvent promouvoir et surveiller le développement socio-émotionnel de l’enfant en prodiguant de façon anticipée des conseils sur le développement et le comportement, en encourageant des pratiques parentales positives, en modélisant une communication faite de respect et de réciprocité entre enfants et adultes, en identifiant et prenant en compte des facteurs de risque psycho-sociaux et en proposant des outils et référents de proximité en cas de nécessité. » Au même moment, des médecins américains avaient publié un texte dans le JAMA exhortant les pédiatres à transmettre aux parents des conseils basés sur des preuves scientifiques pour leur permettre d’accompagner de façon optimale le développement de leur enfant.
En France de telles recommandations n’ont pas encore vu le jour mais ce nouveau D.U dédié au soutien à la parentalité amorce peut-être le début d’un changement de paradigme.